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Directive marchés publics : notion de « certaines tâches essentielles » effectuées par une entreprise pour un groupement d’opérateurs économiques

Affaires - International
Public - Droit public des affaires
10/05/2022
Selon un arrêt de la CJUE du 28 avril 2022, en imposant à l’entreprise mandataire d’un groupement d’opérateurs économiques participant à une procédure de passation d’un marché public de satisfaire aux critères prévus dans l’avis de marché et d’exécuter les prestations de ce marché « dans une proportion majoritaire », la réglementation italienne s’oppose à la volonté du législateur s’agissant de l’article 63 de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014, qui n’autorise le pouvoir adjudicateur qu’à prévoir que « certaines tâches essentielles » soient effectuées directement par le soumissionnaire lui-même ou, si l’offre est soumise par un groupement d’opérateurs économiques, par un participant dudit groupement.
La réglementation italienne sur les marchés publics prévoit que l’entreprise mandataire d’un groupement d’opérateurs économiques participant à une procédure de passation d’un marché public doit satisfaire aux critères prévus dans l’avis de marché et exécuter les prestations de ce marché « dans une proportion majoritaire ».
 
Or, le paragraphe 1 de l’article 63 de la directive 2014/24/UE du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics, prévoit qu’un opérateur économique peut, pour un marché déterminé, avoir recours aux capacités d’autres entités, en ce qui concerne les critères relatifs à la capacité économique et financière ainsi que les critères relatifs aux capacités techniques et professionnelles, et que, dans les mêmes conditions, un groupement d’opérateurs économiques peut avoir recours aux capacités de participants du groupement ou d’autres entités. Le paragraphe 2 de cet article précise que, pour certains types de marché, dont les marchés de services, « les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger que certaines tâches essentielles soient effectuées directement par le soumissionnaire lui-même ou, si l’offre est soumise par un groupement d’opérateurs économiques [...], par un participant dudit groupement ».
 
À propos d’un soumissionnaire évincé dans un marché public de gestion de déchet en Italie, la CJUE est interrogée à titre préjudiciel sur la compatibilité de la législation italienne avec la directive précitée.
 
« Certaines tâches essentielles » : qualitatif Vs qualitatif
 
La Cour relève, sans grande surprise, que la loi italienne fixe une condition plus rigoureuse que celle prévue par la directive 2014/24 et ajoute que cette condition italienne va au-delà ce que permet le texte européen. Et, même si des différences « légères » existent entre certaines versions linguistiques de la directive sur la locution « certaines tâches essentielles », la CJUE note que « la volonté du législateur de l’Union est, conformément aux finalités énoncées aux considérants 1 et 2 de la même directive, de limiter ce qui peut être imposé à un seul opérateur d’un groupement, suivant une approche qualitative et non simplement quantitative, afin de favoriser la participation de groupements tels que des associations temporaires de petites et moyennes entreprises aux procédures de passation de marchés publics » : aussi, l’exigence de « prestations dans une proportion majoritaire » contrevient à une telle approche, dépasse les termes ciblés employés à l’article 63, paragraphe 2, et porte ainsi atteinte à la finalité voulue par le législateur de l’UE d’ouvrir les marchés publics à la concurrence la plus large possible et de faciliter l’accès des petites et moyennes entreprises (point 42).
 
Opérateur concerné par « certaines tâches essentielles » : limitation indue
 
La Cour relève aussi que l’article 63, paragraphe 2, se limite à autoriser les pouvoirs adjudicateurs à exiger, notamment pour les marchés de services, que certaines tâches soient effectuées par l’un ou l’autre participant du groupement d’opérateurs économiques, alors que la loi italienne impose l’exécution des prestations dans une proportion majoritaire au seul mandataire du groupement, à l’exclusion de toutes les autres entreprises qui y participent : ce faisant, cette dernière législation restreint indûment le sens et la portée des termes de l’article 63, paragraphe 2 (point 43).
 
Plus d’information sur ce sujet dans Le Lamy contrats internationaux, n° 173-11, et dans Le Lamy droit public des affaires, n° 1219 et n° 1666 et s.
L’arrêt ici exposé est intégré au numéro 173-11 précité, via une note de l’éditeur, dans la version en ligne de l’ouvrage sur Lamyline dans les 48 heures à compter de la publication de la présente actualité.
 
 
 
Source : Actualités du droit